Coincé deux heures avec toi... • Pv. Kaleigh

La fin des cours venait d’être annoncée. Tous les étudiants sortirent en trombe de la classe, bien plus vite en tout cas que lorsqu’ils ont dû y entrés. Bon nombre d’entre eux se rendaient déjà dans les bars afin de boire un verre et décompresser d’une dure journée de labeur dans les cours. Les professeurs et l’administration n’ont jamais compris ce besoin permanent de devoir souffler après les cours, cette fatigue habituelle ressentie après une journée. Mais ils ne se rendent pas compte à quel point passer plus de 8 heures assis, à tenter de rester concentrer et assimiler plusieurs matières différentes, c’est carrément le summum de l’épuisement. La majeure partie des élèves vont donc, pour se détendre un peu et oublier qu’ils ont une dissertation très importante à rédiger dont la première page est toujours blanche. D’autres, élèves modèles, s’attèlent toute de suite à la tâche et tentent désespérément de s’avancer dans leur travail. Je vous mentirais si je vous disais que je fais partie de la deuxième catégorie des étudiants. Le travail et moi, nous ne sommes pas vraiment compatibles. Et pourtant, on ne peut pas dire que je ne m’implique pas. Bien au contraire ! Depuis mon entrée à Columbia, je n’ai jamais lu autant de livres de toute ma vie et travailler ! C’est pour tout vous dire. J’aimerais faire partie de ces élèves travailleurs et méritants qui font passer leurs études avant tout et qui les considère comme une priorité dans leur vie d’étudiant. Je ferai tout ce qu’il est en mon possible pour y arriver. Mais la plupart du temps, ma personnalité est plus forte que mes ambitions. Souvent, la tentation de souffler, de profiter du bon temps et du fait que je sois à l’université synonyme de liberté et fête plus démentes les unes que les autres, est tellement oppressante que j’y succombe. Je suis faible vous savez. Et incroyablement attiré par toutes ses soirées, les filles, l’alcool et tout ce que ce domaine de débauche induit. Y renoncer, ce serait comme enlever une partie de moi. Obliger quelqu’un à vivre sans sa passion. Impossible. Alors dès à présent, mon but premier est de combiner étude et les nombreuses fêtes auxquelles je dois absolument assister. Des paroles en l’air vous dites, et complètement irréalisables ? Je m’en remets dans ce cas à ce proverbe, très connu : « Quand on veut, on peut », pour vous prouver le contraire.

Comparé aux autres étudiants, je montrai beaucoup moins d’enthousiasme à ce que les cours soient terminés. Etonnant, non ? Mais quand on y regarde de plus près, pas vraiment. A vrai dire, je me suis ramassé deux heures de colles. Et moi qui m’étais dit qu’en rentrant à Columbia ce serait un nouveau départ. Que je commencerais tout depuis le début, une nouvelle page blanche se présentant. Je m’étais bien trompé. Encore une fois, ma vraie nature revenait au grand galop. Elément perturbateur et « je m’en foutiste » dans l’âme. Le prof qui m’avait, si gentiment, octroyé ces deux heures colles ne m’avait pas à la bonne depuis la rentrée il me semble. En fait, c’est moi qui ait tout déclenché en lui lançant une remarque déplacée, je l’avoue, sur sa coiffure, dans le but d’amuser la galerie. J’eus au final droit à des regards noirs de la part de la plupart de mes compagnons de classe et une haine et un mépris que me porte ce cher professeur. Et moi qui avais toujours pensé que même si un prof avait un quelconque différent avec un élève n’en profitait jamais pour l’enfoncer et passait au-dessus de ce petit malentendu, je peux vous assurer que c’en est tout à fait le contraire ! Du moins, c’est ce que j’ai pu constater aujourd’hui, lorsque arrivant avec sa dégaine de coincé, le prof me posa un papier stipulant que j’avais deux heures de colle le jour même. Raison : Devoir non-remis. Une raison qui me laissa un peu perplexe. Depuis quand les professeurs d’universités s’inquiétaient lorsque le devoir d’un de leurs étudiants n’était pas remis en temps et en heure ? Je n’osais pas, enfin le verbe vouloir correspond mieux vu que de l’audace j’en ai peut-être même de trop, aller lui en parler de peur de causer, encore une fois, des problèmes. Autant accepter ces heures de retenue. Ca n’a jamais tué personne à ce que je sache et puis, cela pourrait m’aider à travailler un peu étant donné que depuis le début de la semaine, je n’ai encore rien fait. Vouloir réussir et exceller dans mes études était une ambition mal partie ...

Ce fut donc d’un pas traînant que je me dirigeai vers la salle où se tenait les heures de colle. A mon grand étonnement, il n’y avait que deux personnes dans la classe : un mec trop stone pour se rendre compte qu’il était en retenue et une fille vêtue, enfin vêtue est encore un bien grand mot, d’une mini-jupe et d’un top ne cachant rien. J’haussai un sourcil. C’est donc ce genre de personnes qui se coltinait des heures de colles… Génial. Si je ne voulais pas être de suite catalogué, vaudrait mieux que je n’y suis pas abonné. Je me dirigeai d’un pas lent et dénué de tout enthousiasme vers le surveillant. Je lui tendis mon papier et m’installai à un banc au milieu de la classe. Je regardai l’heure. 16h30. A 18h30, je serai sorti. Je souris en mon for intérieur. Ca me laisserait grandement le temps de profiter de la soirée. Au final, ça ne me perturberait pas de trop en fait. Je laissai mon regard parcourir la salle. Le jeune homme était littéralement avachi sur son banc, un filet de bave naissant sur le coin de sa bouche. La jeune fille quant à elle était on ne peut plus réveillée. Jouant distraitement avec son chewing-gum, elle répondait en même temps à des textos, un sourire coquin aux lèvres. Lorsqu’elle remarqua que je la fixai, elle me fit un clin d’œil. Je lui souris, charmeur. Subitement la porte de la classe s’ouvrit à la volée. La silhouette d’une jeune fille se dessina dans l’embrasure de la porte. Je me retournai vivement et poussai un soupir d'exaspération en reconnaissant Kaleigh. Je laissai ma tête se poser lourdement sur le banc, maudissant la personne qui l’avait mise en colle !